Expositions

Mirement : La ménagerie, L’herbier

Montréal

    La présente exposition de Geneviève Chevalier réunit deux installations, l’une vidéographique et l’autre de réalité virtuelle intitulées respectivement La Ménagerie et L’Herbier. Ces travaux s’inscrivent dans un cycle d’envergure titré Mirement/Towering qui se penche sur le champ de l’histoire naturelle pour en révéler les multiples ramifications sociopolitiques. Ce vaste projet, en trois volets, débute à Dazibao, se poursuivra à la Galerie d’art Foreman de l’Université Bishop’s en septembre 2022 dans le prolongement d’une résidence au ArtLab, pour se clore en mai 2023 à la Galerie UQO. Une publication recensant l’ensemble du projet est prévue.

    Mirement/Towering interroge la conception du monde vivant héritée de la modernité : un monde vivant décontextualisé, simplifié et exploitable. À travers la documentation de certains modes d’appréhension et de connaissance, tels le jardin, la ménagerie et la collection muséale d’histoire naturelle, Geneviève Chevalier explore librement la possibilité de nouvelles perspectives susceptibles de mener à une vision autre du monde vivant. L’herbier et la collection d’oiseaux y sont, par exemple, envisagés en tant que bases de données activées et recontextualisées par une activité de recherche empirique qu’influence l’effondrement de la biodiversité.

    L’étude des collections de spécimens et de représentations d’oiseaux issues du Natural History Museum de Londres ainsi que de sites patrimoniaux anglais est au fondement de l’installation vidéographique à trois entrées intitulée La Ménagerie. Les nombreuses données récoltées par Chevalier recensent l’apparition sur le territoire britannique, en cinquante ans, d’une dizaine d’espèces d’oiseaux originaires de l’hémisphère sud. À ce phénomène, l’artiste confronte l’histoire coloniale britannique, rendue tangible par l’importation au 17e siècle de plusieurs espèces d’oiseaux exotiques exhibés dans les ménageries anglaises pour arborer la richesse et le pouvoir des classes dirigeantes. C’est avec finesse, par de subtils croisements formels et de sens, que se rencontrent ici spécimens d’oiseaux et sites architecturaux pour révéler le caractère singulier du territoire britannique comme témoin de flux migratoires en pleine mutation, influencés tant par les changements climatiques que par des contingences sociopolitiques.

    Avec L’Herbier, c’est aux effets du réchauffement climatique sur la flore de l’Amérique du Nord que s’intéresse Geneviève Chevalier. L’Herbier du Frère Marie-Victorin, conservé à l’Université de Montréal, et les herbiers de l’Université d’Harvard, dont celui élaboré par Henry David Thoreau, servent d’ancrage à cette expérience immersive où le visiteur est appelé à traverser différents tableaux comme autant de passages obligés entre science et nature pour saisir les enjeux actuels de la botanique. Usant d’images produites par modélisation et de prises de vue cinématographiques à 360 degrés, l'œuvre laisse présager un hypothétique avenir où ne resteraient que des représentations d’un vivant qui nous serait antérieur. Un entretien avec le conservateur des Herbiers et professeur à l’Université d’Harvard Charles C. Davis s’insère dans la succession des scènes, confirmant le désolant constat des effets des changements climatiques sur les cycles de floraison et conséquemment la reproduction des plantes.

    Réalisations